« Agir pour l’Ukraine, c’est défendre les droits humains »

Evangelos Kosmidis et Madeleine Bongard / © DR
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Evangelos Kosmidis et Madeleine Bongard
© DR

« Agir pour l’Ukraine, c’est défendre les droits humains »

ÉCHANGES
A Vevey, les comédiens et metteurs en scène Madeleine Bongard et Evangelos Kosmidis montent un travail collectif pour faire connaître la culture ukrainienne. Car l’art permet de mieux comprendre le conflit.

Ils se sont rencontrés à Vevey, autour de la même compréhension de la scène ukrainienne contemporaine. Madeleine Bongard et Evangelos Kosmidis ont fréquemment travaillé à Marioupol, Kiev, ou encore au GogolFest, manifestation internationale de théâtre. Des liens qu’ils souhaitent aujourd’hui partager avec le public. Sur la Riviera vaudoise, ils ont présenté cet été une expo-balade sonore au théâtre L’Oriental. Un travail inédit et amené à se développer, qui permet de mieux comprendre les enjeux du conflit actuel. Y compris pour nos sociétés.

Qu’est-ce qui vous a accrochés dans le théâtre ukrainien?

Madeleine Bongard: Une forme d’urgence qui vous prend aux tripes. Depuis la révolution de Maïdan en 2014, les Ukrainiens placent l’humain au centre de leurs créations, comme un instinct de survie. Les acteurs sont pluridisciplinaires : musiciens, chanteurs, danseurs, plasticiens, marionnettistes, etc. Et ils se relient à leurs racines. Cette manière d’être ancrés au sol leur permet de plonger dans le monde avec une grande écoute, curiosité, ouverture et générosité.
Evangelos Kosmidis: L’urgence de créer les rend libres, spontanés, rapides. Ils partent des tripes, ce qui rend leur créativité précise et concise. En tant que metteur en scène, toutes vos visions peuvent être réalisées.

Quels messages ressortent des œuvres actuelles?

E.K.: Les Ukrainiens se doivent de constamment réaffirmer qui ils sont, d’où ils viennent, et leur droit d’exister. Cela enrichit fortement leur pensée et leur créativité. Leur manière de plonger dans le passé et d’attirer l’attention sur l’Histoire et la culture leur permet de structurer le futur. Nos sociétés européennes, comme à Athènes, d’où je viens, n’osent plus faire ce travail en raison de l’essor des partis d’extrême droite. Ce nationalisme-là n’a rien à voir avec ce que nous avons pu expérimenter en Ukraine, où la notion de racines sous-entend plutôt l’idée de chérir ses traditions.
M.B. : Comme disait Stéphane Hessel (Indignez-vous, 2010), nos valeurs démocratiques s’effondrent si on ne les défend pas. Les Ukrainiens perçoivent ce danger et le transforment en beauté. On peut apprendre d’eux. Leur combat est universel.

N’avez-vous pas peur d’être instrumentalisés dans votre démarche?

M.B.: Non, nous n’avons pas peur, bien au contraire, nous comprenons le désarroi dans lequel nos collègues se trouvent quand leurs propos sont constamment requestionnés par la communauté internationale. L’Ukraine n’est pas dans un conflit, mais subit une guerre imposée par son voisin, et un génocide. Mais jamais nos partenaires ne nous ont demandé de prendre position contre l’envahisseur. Ce projet est né de notre propre volonté.
E.K.: Je confirme. Nous travaillons avec l’Ukraine, mais surtout avec des personnes oppressées qui se battent pour des droits humains. Défendre l’Ukraine, c’est défendre nos droits et notre futur: l’Ukraine est le pays agressé en ce moment, mais cela pourrait en être un autre demain.

Quels sont vos besoins?

M.B. et E.K.: Unir nos forces avec des structures qui auraient la possibilité de soutenir notre travail. C’est aussi simple que ça. Le projet est en cours de création et nous cherchons de nombreux nouveaux partenaires pour le diffuser.