Être humain en prison

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Être humain en prison

Rencontre
Porter une parole chrétienne en prison, c’est le défi quotidien des aumôniers pénitentiaires Michel Schadt et Natalie Henchoz. Pour son deuxième épisode, la série sur les aumôneries solidarités vaudoises vous entraîne derrière les barreaux.

« Mon job ? C’est d’être humain », résume Natalie Henchoz, diacre de l’Eglise réformée vaudoise (EERV) et aumônière œcuménique des prisons depuis presque un an. Elle partage son temps entre La Croisée, à Orbe et la Tuilière, et à Lonay (voir encadré). Etre humain en prison c’est tenir la main d’un détenu qui ne peut parfois s’exprimer que par ses larmes. C’est faire des entretiens dans des cellules, assis entre deux lits sur une chaise en plastique – seul meuble dont dispose un détenu – ou dans une chapelle lorsque c’est possible. C’est faire l’expérience de la frustration, face aux contraintes matérielles et humaines qui rendent impossible un travail réellement correct.

Au rythme du détenu

A écouter Natalie Henchoz, mais aussi Michel Schadt, pasteur de l’EERV et désormais aumônier œcuménique des prisons depuis quatre ans, au Bois-Mermet et aux EPO (voir encadré), on réalise combien l’univers de la prison est en soi profondément traumatique. Y vivre, c’est être dépossédé de beaucoup: ses habits, sa famille, ses moindres habitudes. De l’odeur que l’on respire aux horaires de ses journées, tout y est imposé, codifié. Une routine à laquelle on ne peut échapper. Un lieu de repli sur soi, donc, où la pensée elle même finit par s’emmurer. La prison est aussi une source d’énergie très forte, un lieu de rencontres et d’expériences d’une richesse extrême. L’incarcération peut être un temps propice aux questionnements et aux cheminements intérieurs. C’est notamment ici qu’interviennent Michel Schadt et Natalie Henchoz. Si leurs parcours sont différents, leur approche est similaire. Qu’il rencontre un cadre supérieur ou un délinquant professionnel, l’aumônier offre la même présence: une écoute, sans jugement, sans rapport à remplir, sans décision à rendre, sans pouvoir sur la personne rencontrée. Un travail qui interroge parfois sur le système judiciaire. Découvrir que des personnes jugées « coupables » aux yeux de la loi suisse sont parfois aussi victimes. A l’inverse, s’apercevoir qu’une infraction qui a envoyé son auteur en détention est parfois minime, au regard des crimes et violences qu’il a pu commettre et qui ne sont pas connus de la justice. Mais la vérité juridique d’une situation n’est pas la mission de l’aumônier. Par son accompagnement, qui se fait « au rythme du détenu », il cherche à échanger « le message et la personne de Jésus-Christ » avec l’autre, dans toutes ses dimensions, « celle du corps, de l’âme et de l’esprit », explique Michel Schadt. 

Électrons libres

En cela, l’aumônier diffère de tous les autres professionnels intervenant en prison. Par beaucoup d’aspects, il reste un « électron libre ». Une liberté indispensable pour «développer une relation de confiance et de vérité», affirme Michel Schadt. Cette disponibilité, pour l’essentiel dans un univers dénué de tout, est en soi un engagement profondément chrétien. «Etre présent auprès des plus fragiles est une exigence de l’Evangile et en tant que telle, elle apporte sa crédibilité à l’Eglise», conclut Natalie Henchoz. Cette relation de confiance peut se développer durant des années, et aboutir à des cheminements riches pour les deux parties. «Mon rôle est avant tout d’apporter quelques réponses claires, mais surtout de stimuler le questionnement personnel du détenu. C’est un échange, j’apprends beaucoup de choses des détenus», précise Michel Schadt. C’est peutêtre aussi ça être humain : transformer une période de solitude en véritable dialogue, au sens le plus noble du terme.

Les prisons vaudoises en bref

Il existe six établissements pénitentiaires dans le canton de Vaud. Les aumôniers catholiques et protestants y assurent un travail d’écoute et de culte. On compte notamment, Le Bois-Mermet (Lausanne) et La Croisée (Orbe) qui accueillent principalement des hommes en attente de jugement ou effectuant des peines courtes. La Tuilière (Lonay) accueille des détenus des deux sexes pour des peines plus longues, ainsi que des femmes en attente de jugement. Les EPO (Etablissements de la plaine de l’Orbe) accueillent des hommes jugés et condamnés sur les sites de Bochuz (longues peines) ou la Colonie (fins de peines ou courtes peines).

Infos utiles

Pour contacter l’aumônerie:

www.aumoneriessolidarite.eerv.ch ou www. penitenciers.eerv.ch

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